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NIAMEY, Niger - Barira Harouna, 16 ans, ne ressemble à aucune des autres filles de son village, Bargaja, au Niger dans la région de Maradi. Elle s’est retrouvée paralysée par la polio à seulement 2 ans. Deux ans plus tard, elle perd son papa. Aussitôt sa mère se remarie, laissant Barira avec sa grand-mère. Peu de temps après, Barira commence à mendier à côté d’un magasin pour venir en aide à sa famille.

Elle n'a jamais été inscrite à l'école et n'a jamais voyagé plus de 100 mètres de son domicile. Rien que pour aller mendier devant le magasin c’était tout un problème. Elle a dû marcher à quatre pattes, en utilisant des sandales en plastique pour protéger ses mains. Et à cause de son handicap, elle a dû faire face à la discrimination et tourner en dérision partout où elle allait.

«Je voyait le monde passer, » dit-elle. «Je voyais les enfants de mon âge jouer et courir toute la journée. »

Mais tout a changé en Décembre 2014. Elle s’est inscrite à Ilimin Zama Dunia – qui signifie en français  Initiative d'action pour les adolescentes -   un programme de formation informel.

Bien que Barira ait été privée de chaque occasion d'apprendre, son mentor à Illimin, Rakia Sani, s’est aperçue qu'elle était dotée d’une grande intelligence et super motivée.

« Elle jouit d’une grande capacité  de compréhension et est activement engagée dans le processus d'apprentissage. Elle est de nature positive pour atteindre ses objectifs, et les poursuit malgré les défis à relever », a déclaré Mme Sani, et d’ajouter, « Barira est une combattante. »

Leçons de vie

Barira faisait partie des 10.041adolescents inscrits à la session de décembre 2014 du programme qui réunit les filles vulnérables pendant huit mois de cours sur l'alphabétisation, la santé reproductive, l'hygiène et les droits humains.

En plus d’aider les filles à développer leur estime de soi, les cours sont conçus pour les autonomiser afin de refuser le mariage des enfants  et d’éviter les grossesses précoces. Grâce à l’appui de l’UNFPA, le Ministère de la population, l'autonomisation des femmes et de protection de l'enfance, et l'ONG Matassa Lafia, Illimin compte atteindre 250.000 adolescentes entre 2014 et 2018.

Parmi les 10.041 filles inscrites, soixante-quatre d’entre elles avaient un certain type de handicap, par contre seules Barira et une autre fille de la région de Tillabéri ne pouvaient pas marcher. D'autres avaient un handicap au niveau des membres inférieurs ou étaient aveugles ou ne pouvaient pas entendre. D’autres soufraient aussi de déficiences mentales.

Malgré leurs difficultés, toutes les 64 filles handicapées ont pu suivre les cours, assister aux séances régulièrement, et apprendre leurs droits et leur valeur.

Une nouvelle ère commence

De toute sa vie, Barira n’a jamais vécue une pareille expérience. De fil en aiguille, pour la première fois de sa vie elle a pu se faire des amis.

Pourtant, elle a lutté pour gagner en confiance. «Ma vie n'a pas de sens, » a t- elle a avoué en sanglots aux mentors, lors des quatre mois du programme. « Je suis un fardeau pour la société. Je n’ai aucune valeur car je ne peux rien faire. »

C’est au début du huitième mois que Barira a commencé à se sentir à l'aise. «Je commençais à me sentir en confiance, à contrôler mes attitudes avec les autres, et du coup je me suis senti réévaluée. J’ai découvert que j’avais du talent et que je pouvais être utile à moi-même, à ma grand-mère et même à la société. »

Une porte d'entrée vers  l'indépendance

Un mois avant la fin du programme, un animateur Illimin a annoncé à Barira qu'elle allait recevoir un fauteuil roulant offert par le personnel de l’UNFPA basé à Maradi.

«Quand j’ai annoncé la bonne nouvelle à ma grand-mère, elle a sauté et dansé de joie,» disait Barira.

Quelques jours plus tard, plus précisément le 13 juin, elle recevait son fauteuil roulant lors d'une cérémonie en présence de tous les villageois. Le personnel de Illumin ensemble avec le chef du village avaient déposé le fauteuil près de la porte chez Barira.

Le fauteuil roulant possède trois roues, et est conçu pour permettre à Barira de conduire et d'accélérer avec l’usage de ses mains. « Quand j’ai donné les premiers coups de pédales, je sentais en moi énormément de joie et de bien-être. La sensation de cette nouvelle vie m’a permis d’oublier le passé », a t- elle raconté.

« Maintenant, sa vie a complètement changée. Elle s’est dotée de confiance et de moyens pour parcourir le village et rencontrer de nouvelles personnes. Désormais je participe aux diverses cérémonies dans le village, et je visite à des parents et des amis, » a t- elle confié à l’UNFPA.

 «Mon handicap ne constitue pas une fin en soi, » disait-elle, «parce que je sais que j’ai de valeur. »

–Monique Clesca and Zoulaha Mato