Souad Yacoub vivait paisiblement à El Geneina, au Soudan. Ménagère, elle partageait son quotidien avec son mari, agriculteur et commerçant, et leurs trois enfants.
Alors qu’elle entame sa quatrième grossesse, la guerre éclate et bouleverse son existence. Malgré l’angoisse, Souad et son mari veulent garder espoir. Jusqu’à cette nuit où tout bascule. La famille s’apprête à s’endormir lorsque des tirs retentissent. D’abord lointains, les crépitements des armes se rapprochent. Puis les assaillants forcent la porte et envahissent la cour.
Pour sauver leurs vies, Souad et sa famille s’engagent sur le chemin de l’exil. Mais le déplacement est particulièrement éprouvant. « Notre convoi se déplaçait au son des pleurs des enfants tenaillés par la fatigue, la faim et la soif. On dormait à même le sol et on buvait l’eau des mares », se remémore-t-elle. Dans ces conditions, l’état de santé de la jeune femme enceinte se dégrade rapidement.
« J’étais persuadée que je n’allais pas survivre avec mon état, le traumatisme de la guerre et la maladie », analyse-t-elle avec le recul.
Souad et sa famille parviennent finalement à atteindre le camp de Farchana (Tchad) qui abrite près de 460 000 réfugiés.
Depuis avril 2024, plus de 700 000 réfugiés et 222 000 rapatriés ont fui vers le Tchad. La plupart sont des femmes et des jeunes filles qui ont survécu à des violences extrêmes.
Dans le camp de Farchana, Prisca Tongue, une des 148 sages-femmes humanitaires déployées par l’UNFPA au Tchad, prend immédiatement en charge Souad.
Avec ses collègues sages-femmes humanitaires de l'UNFPA, Souad reçoit en consultations prénatales plus de 150 patientes chaque semaine et réalise une trentaine d’accouchement chaque semaine. Plus d’une cinquantaine de femmes sont également reçues de manière hebdomadaire par les sages-femmes humanitaires pour bénéficier de méthodes de contraception.
Après avoir administré à Souad des soins essentiels, Prisca met en place un suivi personnalisé pour protéger sa grossesse et prévenir toute complication. « Souad est une femme très résiliente. Lorsque je l’ai repérée et conduite au poste de santé pour la première fois, elle était à bout de souffle. Sur le chemin de l'exil, elle a développé plusieurs pathologies graves pour sa vie et celle de son bébé », explique Prisca.
À Farchana, comme dans les treize autres provinces du Tchad où l’UNFPA est présente, le soutien des sage-femmes humanitaires formées à la prise en charge des urgences obstétricales et à l'accompagnement des femmes en situation de crise est précieux pour les femmes et les filles.
Les contributions financières des États-Unis, de la Corée, du Canada, de l'Irlande, et de la Norvège permettent ainsi à UNFPA de dispenser des services de santé sexuelle et reproductive y compris dans les contextes les plus difficiles.
Mais aujourd’hui, au Tchad, plus de 180 sages-femmes, véritables piliers de la santé maternelle, manqueront à l’appel, privant encore davantage les femmes en situation de crises de soins essentiels.
La suppression de la quasi-totalité de nos subventions avec l’USAID et le Département d’État américain aura des conséquences dévastatrices sur les les femmes et les filles qui ont besoin de travailleurs de la santé et de l’aide humanitaire dans les pires crises.
Chaque mois, au Tchad, près de 8 500 femmes enceintes se retrouveront sans suivi médical, mettant leur vie et celle de leurs bébés en danger. Plus de 2 000 femmes accoucheront sans l’assistance d’une sage-femme qualifiée, augmentant considérablement le risque de complications graves et de décès maternels.
Derrière ces chiffres, il y a des vies, celles de femmes, de jeunes filles, et d’adolescentes dont l’avenir repose sur un accès ininterrompu à des services de santé sexuelle et reproductive.