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Des enlèvements aux exécutions sommaires, en passant par la destruction systématique des écoles et des centres de santé, le conflit asymétrique avec Boko-Haram est non-seulement celui de plusieurs millions de déplacés, celui de la précarisation des populations les plus vulnérables, singulièrement les femmes et les jeunes, mais aussi la conséquence de dynamiques économiques, sociales, politiques, religieuses, avec au centre de ce système, une
forte croissance démographique, et en arrière-plan, la dégradation progressive de l’environnement et des écosystèmes.
Les modalités de réponses à ce conflit, comme trop souvent2, sont essentiellement articulées sur un mode réactif : l’action humanitaire et les interventions militaires prenant la part belle des efforts engagés par les Gouvernements et leurs partenaires bilatéraux et multilatéraux. Il est un fait indéniable que le label du terrorisme islamiste, dans toute l’abjection qu’il évoque, est réducteur en ce qu’il fait bon marché de la complexité et
de l’enchevêtrement des dynamiques de la conflictualité. Or, une compréhension fine et multiscalaire de ces dynamiques, constitue un pré-requis essentiel à la formulation d’une stratégie durable de résolution et de prévention
des conflits.
 
L’ensemble des pays autour du Lac Tchad est le terrain d’une crise sécuritaire et humanitaire dont l’ampleur est exacerbée par les attaques perpétrées régulièrement par les éléments de groupes terroristes.
 
Un parallèle pertinent, trop souvent ignoré au profit de lectures culturalistes ou civilisationnelles superficielles, est celui que fait MM Mohamedou entre les organisations terroristes en Afrique de l’Ouest et dans le
Sahel, et les grands cartels de la drogue en Amérique Latine, dont la résilience et la force résident dans une interaction parasitaire avec leur environnement social immédiat, et par une exploitation des plus vulnérables
et des plus influençables, par la force ou en capitalisant sur le caractère limité des opportunités alternatives offertes à ces derniers.
 
Le présent document vise à apporter un éclairage sur la multiplicité des dynamiques sous-jacentes qui rendent ce parallèle pertinent, et qui justifient la mise en oeuvre d’une action ciblée, qui dépasse l’action militaire,
et dans laquelle la démographie constitue une variable essentielle et structurante.
 
Ce document se fonde sur l’analyse de situation des mêmes pays « Dynamique démographique et la crise autour du lac Tchad » qui a été produit en interne par le Bureau Régional de l’UNFPA pour l’Afrique de l’Ouest
et du Centre. En particulier, la notion de dividende démographique sera mise en avant comme paradigme susceptible de structurer l’action, non seulement dans une perspective de résolution du conflit mais aussi de développement : le tandem étant essentiel à la durabilité de la première commedu second. Sa pertinence dans le contexte spécifique des pays autour du  Lac Tchad sera ensuite explicitée, et des considérations stratégiques quant à
l’action à mener seront ensuite proposées.