Malgré le fort potentiel économique qu’il présente du fait de l’existence et de l’exploitation de ressources minières abondantes (pétrole au Cameroun, au Nigéria et au Tchad, uranium au Niger), le bassin du Lac Tchad est confronté à de nombreux défis écologiques, socioéconomiques et sécuritaires. En plus des changements climatiques (sécheresse constante) qui accentuent le retrait progressif des eaux du lac, et leurs répercussions sur la pauvreté, il règne dans cette partie de l’Afrique un extrémisme violent lié à des actes terroristes perpétrés par les éléments de Boko Haram qui mènent régulièrement depuis 2002 des attaques contre des localités frontalières. Ces évènements récents observés aussi bien au Cameroun, au Nigeria, au Niger et au Tchad, en attirant l’attention sur le développement du terrorisme international ainsi que sur la vulnérabilité des populations et de l’ensemble de la région.
Parmi les multiples causes de ces crises observées dans la région, figure la forte croissance démographique (l’une des plus élevée du monde) qui verra la population de ces pays doubler dans les vingt prochaines années. En effet, alors que des progrès significatifs sont réalisés dans les autres régions du continent africain, les pays autour du Lac Tchad sont tous à la traîne dans leur transition démographique.
La baisse de la mortalité des enfants observée au cours de ces dernières années dans cette région comme dans la plupart des pays du monde, n’a pas encore conduit à une baisse conséquente de la fécondité, comme cela est prédit dans le schéma classique de la transition démographique. Dans la plupart des pays le nombre moyen d’enfants par femme est encore élevé et ne connaît pas pour le moment une baisse significative. Il avoisine ou dépasse 5 enfants par femme.
Une absence d’investissements conséquents dans ces domaines, notamment dans l’éducation, la santé et la création d’emplois stables pour les jeunes, aura en effet des conséquences plus graves pour ces pays, qui se traduiront par une augmentation du nombre de grossesses d’adolescentes et de jeunes chômeurs ou d’inactifs, un secteur informel en pleine croissance avec une faible productivité et une plus petite proportion de travailleurs salariés. C’est dans un tel contexte que les migrations peuvent apparaître pour les jeunes comme une alternative au manque d’emploi, et pourraient s’intensifier au cours des décennies prochaines et exacerber les tensions régionales, les catastrophes humaines ou la radicalisation déjà observées.
C’est pourquoi, le Fonds des Nations Unies pour la population, ayant pris la pleine mesure de la situation, a inscrit les concepts du « No one left behind » et du « Put Young People First », qui sont des promesses centrales de l'Agenda 2030 pour le développement durable, au coeur de sa vision en matière de développement.Cela pour traduire la priorité qu’il accorde aux femmes et aux jeunes et marquer son engagement à contribuer à trouver une réponse efficace aux nombreux problèmes de ces groupes cibles. Cette vision s’inscrit également dans la pensée de M. Antonio Gutteres, secrétaire général des Nations Unies qui estime que « Plus de ¾ des africains ont moins de 35 ans. Pour tirer profit de cet énorme potentiel nous avons besoin de plus d'investissements dans l'éducation, la formation, le travail décent et nous devrons aussi impliquer les jeunes dans la construction de leur propre avenir…Investir dans les jeunes c’est aussi assurer notre sécurité collective ».
Je voudrais donc exhorter l’ensemble des partenaires au développement y compris la communauté des bailleurs à s’associer à ce combat et à mettre en place une stratégie plus efficace pour le développement des pays autour du lac Tchad.